Il y a quelques mois, une jeune femme sur Instagram m’a contactée pour une interview.
En parcourant son profil, je constate qu’elle vend du maquillage, ce qui n’est pas vraiment mon cœur de cible, bien que je sois spécialisée dans la santé et le bien-être. Je décide de ne pas m’arrêter à cet a priori et je réponds favorablement à sa demande que l’on échange par téléphone, pour en savoir plus sur son projet.
Elle m’annonce de but en blanc qu’elle souhaite réaliser ces vidéos témoignages car les gens aujourd’hui manquent d’empathie. L’idée serait donc que je parle de ma vie avec un seul poumon, compte tenu du fait que la société me perçoit comme un monstre, afin de montrer au grand public que je n’en suis pas un.
Je lui réponds poliment que je vais réfléchir à sa proposition, mais, sans suspense, je n’y donnerai pas suite. Sa maladresse, après m’avoir choquée, m’interpelle.
Est-ce que vraiment en temps que malades ou anciens malades nous sommes toujours perçus aux yeux de la société comme des monstres ? Quels sont les représentations que se font les « biens portants » du cancer et de la maladie ?
Tout un chacun a une part de monstruosité enfouie en lui, d’inquiétante étrangeté, un mélange de crasse et d’or comme le formule Pacôme Thiellement, mais est-ce que cette noirceur, cet abîme, est exacerbé quand on est malade ? Faut-il montrer (monstrer) notre maladie ? Quelles émotions suscite-t-on de par notre statut ? Peur, empathie ou pitié comme semblait vouloir plutôt dire cette jeune femme.
Cette réflexion m’a finalement amenée à produire cette série de collages, personnages hybrides entre humains et monstres, comme de nouvelles formes de monstration de la maladie et du cancer. Cette thématique de la monstruosité sera également explorée au travers des ateliers que je déploie avec Créer comme respirer.