Ré(mission) → Ce que le cancer a changé à ma vie professionnelle en sept déclics

vignette copie

Vers de nouveaux horizons professionnels.

1 copie

2

illu-retouchee

vignette copie
1 copie
2
illu-retouchee

Pendant les six derniers mois de l’année 2019, ma carrière professionnelle a été mise entre parenthèses : j’ai découvert en effet fortuitement pendant l’été, bien que n’ayant jamais fumé, l’existence de deux tumeurs cancéreuses dans mon poumon droit ayant abouti à la résection complète de ce dernier au mois de septembre de la même année. Au-delà d’avoir refaçonné ma vie personnelle, cette expérience m’a également fait reconsidérer – et réinventer – en profondeur mon activité professionnelle. Voici comment

  1. 1. Le cancer m’a permis de retrouver du sens à mon métier

Cela faisait quatre ans début 2019 que j’avais lancé mon activité et cette dernière était, tout comme moi, en train de s’essouffler. Par un curieux hasard, tous mes clients “historiques” ont cessé de faire appel à moi sans s’être concertés peu de temps avant que je ne reçoive mon diagnostic ! 

Cette épreuve a donc été pour moi une opportunité de dresser le bilan de ces quatre années d’indépendance, en me demandant où je souhaitais aller pour la suite et en m’assurant d’être toujours alignée avec mes aspirations profondes. J’ai alors pu constater que j’avais progressivement dévié de mon horizon initial, notamment concernant la nature des commandes sur lesquelles je travaillais, qui ne correspondaient pas, plus, à ce dont j’avais toujours rêvé : ce cancer me donnait le temps et l’opportunité de me recentrer sur mes intentions premières.

J’ai, dès l’annonce de ce dernier eu la volonté de le transcender pour n’en garder que le meilleur, autrement dit de convertir le négatif en positif et le transformer ainsi en une force en en “faisant” quelque chose. Mettre mes compétences en design graphique et en illustration au service de la santé et du bien-être m’est après quelques mois de réflexion apparu comme une évidence : j’avais enfin trouvé la raison d’être de mon activité.

  1. 2. J’ai accepté de me faire aider pour relancer mon activité

Début 2020, j’ai ainsi choisi de redémarrer en quelque sorte de zéro une nouvelle aventure, avec une nouvelle clientèle, de nouveaux projets, et, bien qu’ayant derrière moi quatre années d’entreprenariat, je n’en menais pas largeJ’ai donc pris la décision d’investir dans un coaching, afin de remettre mon activité sur de bons rails et pouvoir bénéficier d’un regard complémentaire au mien. J’ai ainsi pu repositionner mon activité et me présenter désormais non plus comme une simple graphiste mais comme une véritable directrice artistique, opérant dans les champs de l’identité visuelle, de l’illustration et des ateliers sur mesure.

Sur les conseils avisés de ma coach, j’ai réactivé mon réseau existant et contacté d’autres homologues directeurs artistiques afin de leur poser des questions sur leur façon de mener leur barque : une mine d’inspiration afin d’enrichir ma propre approche du métier !

J’ai eu la chance également à la fin de l’année 2020 de recevoir gracieusement l’aide précieuse d’un consultant qui m’a permis de prendre conscience de toutes les parts de moi me constituant et ainsi d’ouvrir les champs de mon activité professionnelle en vue de diversifier mon offre. Je m’autorise ainsi désormais à facturer des missions d’écriture, et à assumer pleinement ma casquette d’artiste.

  1. 3. J’ai remisé au placard le syndrome de l’imposteur qui me paralysait dans ma pratique

En parallèle de mes investigations réseau, j’ai également démarché des dizaines de prospects gravitant autour de la santé et du bien-être, en adéquation avec mon nouveau cœur de cible, bien que n’ayant à proprement parler pas de références dans ces domaines spécifiques à leur montrer dans mon portfolio. 

En effet, malgré le fait que je sois diplômée en illustration, j’ai toujours eu du mal à en assumer le titre, alors, quand j’ai décidé de m’approcher des rédactions des magazines bien-être afin de leur proposer mes services, le chant de l’imposteur s’est remis à tourner en boucle dans ma tête. Je me sentais pourtant légitime, au vu de mon expérience de la maladie et de tous les changements qu’elle avait opérée sur moi (si quelqu’un m’avait dit il y a deux ans que je ferais de la cohérence cardiaque et du yoga quasi quotidiennement je ne l’aurais pas cru !) de solliciter ces clients potentiels.

J’ai donc pris mon courage à deux mains et je leur ai envoyé un mail, en l’assortissant d’une sélection bien choisie de visuels conçus pour l’occasion. 

J’ai non seulement capitalisé sur mes collaborations passées, mais j’ai aussi parié sur des projets personnels (notamment mon projet Poumonoprix), en rapport avec les activités des clients ciblés afin qu’ils puissent s’y projeter et avoir envie de travailler avec moi (je parlerai plus longuement dans un prochain article de l’importance selon moi de cultiver ces projets personnels).

  1. 4. J’ai réorganisé ma façon de travailler et j’ai établi une vision sur le long terme de mes objectifs professionnels

Après plusieurs mois de convalescence et de confinements successifs, j’ai dû me replonger dans le rythme d’une vie d’indépendante travaillant seule à la maison, ne pouvant compter sur personne d’autre que moi-même pour avancer. Afin de m’auto-discipliner, j’ai listé quels étaient les objectifs que je voulais atteindre à court, moyen et long terme, en les formalisant le plus précisément possible à l’aide d’indicateurs chiffrés : réaliser cette année cinq épisodes de podcast, faire une illustration par semaine à intégrer dans mon portfolio pendant deux mois, poster un article chaque mercredi sur Linkedin… 

Même si la tenue de ces tâches n’est pas toujours une science exacte, les garder ainsi en tête me permet d’établir un ordre des priorités afin d’éviter de me disperser. Je les inventorie et les structure à l’aide d’outils comme Trello ou Google Agenda, de telle sorte de pouvoir en suivre les avancées.

Depuis le début de l’année 2021, j’ai également initié avec une amie freelance, un après-midi de travail deux fois par mois, afin de nous entraider mutuellement et mesurer le chemin parcouru par chacune.

  1. 5. J’ai appris à mettre davantage mes limites dans le cadre professionnel

Le réagencement de mon activité devait aussi passer par un meilleur partitionnement entre ma vie personnelle et professionnelle. Ayant identifié que j’étais plus productive l’après-midi que le matin, je privilégie désormais le travail sur mes projets de direction artistique à ce moment-là de la journée, après le déjeuner, appels téléphoniques, rendez-vous clients éventuels et réponses aux mails compris. Dans la matinée, je m’occupe davantage à des tâches personnelles : vélo d’appartement, cohérence cardiaque, yoga, tricot, lecture… et m’autorise parfois même une grasse matinée si je me suis couchée tard la veille. 

Là encore, je n’arrive pas tous les jours à appliquer cette routine idéale à la lettre, mais le simple fait de l’avoir visualisée dans ma tête m’encourage à vouloir la tenir plus scrupuleusement. Les progrès sont toutefois notables, car il y a encore quelques mois je ne parvenais pas à me réveiller avant onze heures, je traînais en pyjama jusqu’au début de la soirée et je sautais systématiquement le repas de midi ! 

Je n’accepte également plus de travailler à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, sauf circonstances exceptionnelles, et en pratiquant de fait des tarifs majorés.

Je m’efforce enfin à ce que lorsque je ferme mon ordinateur en début de soirée je ne le rallume pas avant le lendemain, de façon à rendre mon cerveau disponible à la détente et au repos, et m’éloigner un tant soit peu des écrans.

Je suis finalement beaucoup plus à l’écoute de mon corps et de ses besoins, et ce dernier est devenu mon curseur quand il s’agit pour moi de prendre des décisions : un client me propose de travailler bénévolement sur un projet et cela me fait ressentir de l’exaspération ? Je décline poliment son invitation en lui rappelant que mon métier n’est pas un passe-temps. Un autre me demande trop de modifications et cela commence à me prendre trop de temps ? Je lui rappelle quels sont les termes que l’on a convenu ensemble sur le devis… et ainsi de suite.

  1. 6. J’ai apprivoisé le lâcher-prise pour relativiser les revers de mon activité

Avec l’épidémie de coronavirus, j’ai vu certains de mes projets reportés, et j’ai dans un premier temps été déçue que les choses ne se déroulent pas comme elles étaient prévues. Ces quatre dernières années également, j’ai beaucoup ruminé quant à des collaborations qui se sont mal terminées ou qui n’ont finalement jamais vues le jour, ressenti de la frustration face à des clients qui n’ont pas considéré mon travail à sa juste valeur ou qui du jour au lendemain ne m’ont plus jamais rappelée, culpabilisant de ne pas avoir été à la hauteur. J’ai compris avec le recul que je ne pouvais pas avoir le contrôle sur des événements souvent indépendants de ma volonté, que je n’étais pas la seule responsable de ces échecs – si tant est qu’ils en soient vraiment – et que je pouvais au contraire choisir de les regarder et de les interpréter autrement. Ces incompréhensions, ces mauvais timings, ces erreurs de parcours… font l’entrepreneure que je suis aujourd’hui et je n’échangerais cette expérience contre aucune autre, car elle m’a forgée et fait grandir.

Je ne suis pas à l’abri d’autres déconvenues dans ma vie professionnelle, mais, plutôt que de les craindre ou d’y voir un passé qui se répète, je préfère les aborder comme faisant partie du jeu, avec le maximum de distance et de sérénité.

Je me concentre désormais sur ce qui dépend de moi, là encore en faisant preuve de bienveillance vis-à-vis de moi-même : non, ce n’est pas grave si je n’ai pas respecté exactement mon planning du jour… pourvu que cette indulgence ne se transforme pas en complaisance !

  1. 7. J’ai pris conscience de ma chance d’exercer ce métier

À l’heure où les reconversions professionnelles et les burn-outs sont légion, je me suis rendue compte de la chance que j’avais de pouvoir quotidiennement pratiquer un métier qui me passionne. Même si je ne peux pas encore affirmer que je vis correctement de mon activité, qui plus est après de longs mois d’arrêt maladie et du fait de la crise sanitaire qui a suivi, j’ai confiance en le fait que j’y parviendrai bientôt en mettant mes compétences au service de projets et de collaborations enrichissantes, dans tous les sens du terme. 

Je cultive cette joie de chaque jour pouvoir me perfectionner, me dépasser, me surprendre même, avec une motivation et un plaisir qui sont, malgré cette épreuve, restés intacts.